À l'Assemblée

Mes questions à Pierre Moscovici sur le dumping fiscal pratiqué par l’Allemagne en matière de TVA porcine et sur les inquiétudes liées à la réforme de la PAC

En 2017 vous nous aviez annoncé une réforme de la TVA plus simple et étanche à la fraude. Vous nous avez fait des difficultés que vous aviez à la mettre en place. Est-ce que vous pensez que votre successeur va poursuivre le travail que vous avez accompli ?

Dans cette même logique, je voudrais évoquer avec vous le dumping fiscal qui a été pratiqué par l’Allemagne en matière de TVA porcine. Je vous avais déjà interrogé sur ce sujet. L’Allemagne a interprété la directive européenne à l’avantage des fermes allemandes en accordant aux deux tiers d’entre elles la possibilité d’opter pour le très favorable régime forfaitaire alors qu’il ne s’agit pas de petites exploitations.

 

Les recours juridiques portés par le Collectif contre le dumping fiscal agricole en Europe ont commencé à porter leurs fruits puisque la Commission européenne a ouvert, en mars 2018, une procédure d’infraction contre l’Allemagne. Et, le 17 avril dernier, c’est la Cour des comptes allemande qui a estimé que l’État fédéral ne respectait pas le droit européen en matière de TVA.

Je souhaiterais aujourd’hui que vous me disiez quelles suites vont être données à ce dossier qui pénalise les éleveurs français depuis maintenant une dizaine d’années.

Enfin, une dernière question plus générale. La réforme de la PAC avance lentement et elle ne sera pas finalisée à temps pour être applicable en 2021. Un certain nombre de députés estime même que la période de transition d’un an qui vient d’être annoncée n’est pas réaliste qu’il ne sert à rien de créer des attentes qu’on ne pourra pas remplir vu l’état d’avancée actuel de la réforme, notamment dû aux incertitudes relatives au prochain cadre financier pluriannuel.

Ce flou quant au futur budget et à la durée des négociations provoquent de vives inquiétudes au sein du monde paysan. A votre avis, quel sera le calendrier probable des négociations ?

 

Réponse de Pierre Moscovici :

Je dois confesser en effet que nous n’avons pas réussi à faire la grande réforme systémique, structurelle, de la TVA à l’échelle européenne que j’appelle de mes vœux, qui aurait surtout consisté à faire en sorte que les opérations transfrontalières soient traitées comme des opérations domestiques et faire ainsi disparaître la fameuse fraude « Carrousel ». Il est indispensable que ce dossier reste sur la table et que mon successeur, Paolo Gentiloni, le reprenne.

En ce qui concerne la fraude à la TVA des agriculteurs allemands, je connais votre persistance sur le sujet. J’ai ouvert cette procédure en mars 2018, l’Allemagne a répondu un avis motivé en mars 2019, mes services sont en train d’analyser attentivement l’ensemble des données et les arguments dans la réponse des allemands. Si la commission n’était pas convaincue par les contre-arguments de l’Allemagne, ça pourrait conduire à saisir la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE). Plus généralement, c’est un cas qui est évocateur de la difficulté de faire évoluer la directive TVA avec son temps du fait de la règle de l’unanimité.

Sur la PAC, plus de cinquante ans après sa conception il est indispensable de l’adapter au monde moderne. La Commission a présenté une proposition qui maintient un budget qui reste très important pour l’agriculture. C’est un budget qui reflète aussi une ambition pour le modèle agricole européen avec un souhait que la PAC bénéficie davantage aux petites et moyennes exploitations et moins aux grandes. Il faudra bien sûr que cette réforme de la PAC s’insère dans le cadre d’une réforme plus large de nos finances publiques européennes. Plusieurs questions sont posées ici : le montant, le plafond… L’un d’entre vous m’a interrogé sur l’augmentation du prélèvement européen pour la France. En effet on ne peut pas avoir une politique européenne ambitieuse qui traite à la fois de la questions climatique, migratoire, éducative, de la jeunesse, qui maintienne une politique agricole ambitieuse et une politique économique qui soit puissante et se contenter des plafonds budgétaires que l’on a aujourd’hui. Et si on devait déplafonner, à ce moment-là, les contributions nationales ne pourraient pas rester inchangées. C’est l’équation complexe qui est posée – non pas au Parlement européen puisqu’il a un rôle en l’occurrence de co-législateur sur le budget annuel – mais aux chefs d’Etat et de Gouvernement au sein du Conseil européen avec les perspectives pluriannuelles qui vont maintenant être traitées.

Sur la PAC :
• Du point de vue du Parlement européen, nous sommes dans l’attente des premières propositions des nouveaux comités en charge de l’agriculture et de l’environnement.

• Du point de vue du Conseil, les progrès sont constants mais, il faut bien le reconnaître, encore relativement lents.

• Du point de vue de la Commission, elle préconise des progrès plus rapides.

Cette discussion va aussi se nouer dans le cadre de discussions plus larges qui maintenant s’ouvrent de manière décisive sur les perspectives pluriannuelles.

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